Article 121-2 du Code pénal : le représentant de la personne morale peut être une autre personne morale

Aux termes de l’article 121-2 du Code pénal, les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.

Le juge doit dès lors identifier l’organe (dirigeant) ou le représentant (délégataire de pouvoirs express ou tacite) qui a commis l’infraction de nature à engager la responsabilité pénale de la personne morale.

Par arrêt en date du 21 juin 2022, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a :

  1. Confirmé la décision de la Cour d’Appel de PARIS qui, pour déclarer une société filiale X (employeur du salarié victime d’un accident du travail) coupable de blessures involontaires et d’infractions au Code du travail,
    • a écarté la délégation de pouvoirs du Directeur d’usine de la société X, faute de remplir les 3 critères de validité (compétence, autorité et moyens)
    • et a identifié la société-mère Y (Holding), Présidente de sa filiale X, comme étant la représentante légale et donc l’organe de cette filiale au sens de l’article 121-2 du Code pénal.
  2. Infirmé la décision de la Cour d’appel de PARIS qui, pour déclarer la société-mère Y coupable de blessures involontaires a jugé que sa filiale X avait commis l’infraction au nom et pour le compte de la Holding Y, au sens de l’article 121-2 du Code pénal.

Le simple fait de se reposer sur une délégation imparfaite constituait, pour les juges d’appel, une faute d’organisation managériale ayant une répercussion directe sur la sécurité dans l’entreprise. L’employeur aurait dû prévoir la présence d’un délégataire sur le site industriel ou exercer lui-même la surveillance indispensable à l’application effective de la réglementation relative à l’hygiène, à la sécurité et aux conditions de travail

En condamnant la société-mère Y, la Cour d’appel a en effet méconnu le principe légal défini par l’article 121-2 du Code pénal puisque par définition, une société filiale ne peut pas être l’organe dirigeant ou le représentant de sa société-mère Y.

Cette inversion dans l’application du texte a justifié la cassation de l’arrêt de la Cour d’appel de PARIS.

L’apport de cet arrêt publié au bulletin est double :

  1. Il rappelle l’obligation pour les juges du fond d’identifier l’organe dirigeant ou le représentant ayant commis l’infraction pour le compte de la personne morale et susceptible d’engager sa responsabilité pénale (jurisprudence constante de la Cour de cassation) ;
  2. Surtout, alors que l’article 121-2 du Code pénal se contente de viser les « organes », cet arrêt vient préciser que l’organe d’une personne morale peut être une autre personne morale (et pas seulement une personne physique), ce qui confirme la tendance actuelle de la Cour de Cassation à appliquer de la façon la plus large possible les textes relatifs à la responsabilité pénale des personnes morales.

Arrêt du 21 juin 2022 de la Chambre criminelle de la Cour de Cassation (Cass. Crim., 21 juin 2022, pourvoi n°20-86.857)