Seule une volonté manifeste et intentionnelle de l’entreprise de travail temporaire de ne plus proposer de missions à un salarié intérimaire titulaire de mandats nécessite une autorisation préalable de l’Inspection du Travail

Tout comme les salariés permanents qui bénéficient d’une protection contre le licenciement, les salariés intérimaires titulaires de mandats bénéficient d’une protection spécifique tenant compte de la particularité des contrats de travail temporaire.

Ainsi, en application de l’article L.2413-1 du Code du Travail, l’autorisation préalable de l’Inspection du Travail est nécessaire dans deux cas précis limitativement énumérés :

  • La rupture anticipée du contrat de mission,
  • La notification du non-renouvellement d’un contrat de mission.

Que ce soit en cas de rupture anticipée d’un contrat de mission ou en cas de non-renouvellement d’un contrat de mission, l’entreprise de travail temporaire procède à un acte pouvant s’analyser en une rupture du contrat de mission.

L’autorisation de l’Inspection du Travail est donc requise.

Toutefois, la notion de renouvellement d’un contrat de mission doit se distinguer de la proposition d’une nouvelle mission.

En effet, le renouvellement consiste à prolonger un contrat de mission déjà existant, avec le même motif de recours et sur le même poste.

Un nouveau contrat de mission peut concerner un autre motif de recours, ainsi qu’un autre poste et des conditions de travail et de rémunération différentes.

Dans les faits d’espèce ayant conduit aux deux arrêts des 30 janvier 2019 et 6 mars 2019, les demandeurs – salariés intérimaires titulaires de mandats – demandaient à être déclarés électeurs et éligibles lors d’élections professionnelles. Ils prétendaient en effet avoir été privés de la possibilité de remplir les conditions légales et conventionnelles d’électorat et d’éligibilité en raison de la violation par l’entreprise de travail temporaire des dispositions de l’article L.2413-1 du Code du Travail, laquelle aurait cessé de leur confier des nouvelles missions.

Déboutés par les juges d’instance, les demandeurs ont formé un pourvoi, rejeté par la Cour de Cassation.

La Haute juridiction a en effet relevé que l’entreprise de travail temporaire d’une part, n’avait pas mis fin de manière anticipée aux dernières missions effectuées par les demandeurs, dont aucun renouvellement n’était prévu, et d’autre part, avait proposé de nombreuses missions aux salariés intérimaires, missions correspondant à leur qualification, auxquelles ils n’avaient jamais répondu.

La Cour de cassation en a donc déduit qu’aucune décision manifeste et intentionnelle de l’entreprise de travail temporaire ne pouvait être retenue, laquelle n’avait pas violé les dispositions précitées de l’article L.2413-1 du Code du Travail.

Elle confirme également que les deux demandeurs ne remplissaient pas les conditions d’ancienneté pour être électeurs ou éligibles.

Ainsi, la Cour de Cassation confirme de manière très claire et sans ambigüité que seule une autre hypothèse peut conduire l’entreprise de travail temporaire à faire application des dispositions précitées de l’article L.2413-1 (confirmant ainsi un précédent, Cass. Soc 24 octobre 2012, n°11-21.946).

En cas de décision manifeste et intentionnelle de ne plus proposer aucune mission au salarié intérimaire titulaire d’un mandat, l’entreprise de travail temporaire doit solliciter l’autorisation préalable de l’Inspection du Travail (Cass. Soc 30 janvier 2019, n°17-17.926 et Cass. Soc 6 mars 2019, n°18-11.311 et 18-15.775).

En revanche, lorsqu’à l’issue d’une mission, l’entreprise de travail temporaire ne propose pas au salarié intérimaire titulaire d’un mandat une nouvelle mission, l’Inspection du Travail n’a pas à être saisie.

Si ces deux décisions ont été rendues dans le cadre d’un contentieux électoral, leur portée est bien plus large, puisque la solution retenue par la Cour de Cassation pourra être invoquée devant le juge prud’homal, notamment en cas de discrimination syndicale alléguée par les salariés intérimaires titulaires de mandats.