La loi du 18 novembre 2016 n°2016-1547 de « modernisation de la justice du XXIème siècle » a dessiné la réforme du contentieux de la sécurité sociale.
Les décrets n°2018-928 du 29 octobre 2018 et n°2018-772 du 4 septembre 2018 en ont précisé les contours.
Ces textes sont entrés en vigueur au 1er janvier 2019.
1 – Contentieux général
La saisine de la commission de recours amiable (CRA) reste inchangée.
Ainsi, à compter de la notification de la prise en charge de la maladie ou de l’accident, l’employeur dispose toujours d’un délai de deux mois pour saisir la CRA sous peine de forclusion.
Désormais, la CRA dispose d’un délai de deux mois (et non plus d’un mois) pour statuer.
A l’issue de ce délai, l’employeur dispose toujours de deux mois pour saisir, non plus le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS), mais le tribunal de grande instance (TGI).
Les délais de procédure sont ainsi allongés.
Objectif de la réforme : augmenter le nombre de décisions exprès des CRA pour désengorger les tribunaux.
Depuis le 1er janvier 2019, le TGI doit être saisi par voie de requête comprenant les mentions prescrites par l’article 58 du code de procédure civile ainsi qu’un exposé sommaire des motifs de la demande.
La requête doit être accompagnée :
- Des pièces listées dans un bordereau annexé à la requête.
- Une copie de la décision contestée (exprès ou implicite).
Sanction : le président du tribunal peut, par ordonnance motivée, rejeter les requêtes manifestement irrecevables, sans débat contradictoire.
En cas de litige d’ordre médical, le greffe adresse copie de la requête soit à la caisse, soit à l’auteur de la décision contestée, l’invite à présenter ses observations écrites, et à les communiquer aux parties à l’instance dans un délai de 20 jours.
La convocation du demandeur l’invite à comparaître en personne afin qu’il puisse être procédé le cas échéant à une consultation clinique à l’audience. (article R143-10-3 du code de la sécurité sociale).
Question : sur le recours de l’employeur relatif à une question d’ordre médical, une mesure d’expertise sur pièces sera-t-elle ordonnée par le juge ou le salarié sera-t-il convoqué ?
2 – Le contentieux technique
A l’inverse du contentieux général peu modifié, c’est ici que la réforme fait œuvre créatrice.
Désormais, toute contestation d’une décision attributive de taux d’incapacité doit être soumise à une Commission Médicale de Recours Amiable (CMRA), préalablement à la saisine du TGI (et non plus du TCI qui a été supprimé).
Cette CMRA est composée de trois médecins dont deux experts judiciaires et un médecin conseil de la CPAM.
Il est souhaitable de saisir la CMRA lettre recommandée avec accusé de réception.
Le secrétariat devra notifier sans délai le rapport d’évaluation des séquelles au médecin-conseil de l’employeur, lequel disposera d’un délai de 20 jours pour faire valoir ses observations ou autres contestations.
La commission devra établir un rapport motivé.
Dès notification de la décision, l’employeur disposera d’un délai de deux mois pour saisir le TGI.
L’absence de décision de la CMRA dans un délai de 4 mois à compter de sa saisine vaut rejet implicite de la demande.
Dans l’hypothèse d’un rejet des demandes présentées devant le TGI, l’appel sera interjeté non plus devant la CNITAAT mais devant l’une des cours d’appel spécialement désignées.
3 – Le contentieux de la tarification
Le mode introductif de l’instance est bouleversé.
Les litiges relevant du contentieux de la tarification (principalement la fixation du taux de cotisation, l’octroi de ristournes, l’imposition de cotisations supplémentaires) ne sont toujours pas soumis à un recours préalable obligatoire.
Et la CARSAT peut être saisie d’un recours gracieux.
Le recours contentieux est désormais porté devant la Cour d’appel d’Amiens, statuant en premier et dernier ressort.
Le recours est formé par voie d’assignation à une audience préalablement « indiquée » par le premier président, dans les formes prévues par les textes.
Cette procédure s’apparente à une assignation à jour fixe et non à une simple déclaration d’appel.
Le législateur a complexifié la procédure de la tarification, qui générera des frais de justice complémentaires.
4 – Fin de la gratuité
L’époque où la procédure devant les juridictions de sécurité sociale était gratuite est révolue.
Dorénavant, le TGI devra statuer sur les dépens selon les conditions posées par l’article 696 du CPC.